LA NOUVELLE-ORLÉANS AU COEUR
Julien Crué
SOUL BAG 185 - Décembre 2006
Merci à Elvire Lilienfeld de L'IMEC et à Jazz Sous les Pommiers pour l'organisation
des rencontres avec Charlie Miller.
C'est dans le cadre d'un programme du ministère français de la Culture lancé après le
drame de Katrina que le trompettiste néo-orléanais Charlie Miller a été accueilli
pendant quelques semaines au printemps dernier en Basse-Normandie. Séjour à l'IMEC
(Institut Mèmoires de l'Édition Contemporaine) près de Caen et participation au 25e
festival Jazz Sous les Pommiers à Coutances: ce rescapé de l'ouragan poursuit avec
bonhomie, générosité et ouverture un parcours artistique commencé il y a 68 ans à la
Nouvelle-Orléans.
Charlie Miller est né le 14 mars 1938 à la Nouvelle Orléans dans une famille à la fois
pauvre, nombreuse et musicale. "Avant de parler, je chantais les chansons que
j'entendais à la radio", se souvient le musicien qui raconte que sn premier instrument
de musique a été le tuyau d'une machine a laver dans lequel il soufflait jusqu'a en
avoir mal à la tête.
Vers 1947, la famille de Charlie Miller déménage à l'extérieur de la Chrescent City,
dans une petite maison de trois pièces . a l'âge de 11 ou 12 ans, il reçoit sa première
trompette des mains du père de l'un de ses camarades. Seule condition pour ce don: que
Charlie apprenne à jouer Sugar Blues de Clyde McCoy.
Peu de temps après des gens comme Fats Domino, Earl King, Huey Smith qui ne faisaient
que commencer à percer sur le marché blanc. Mais c'est la musique que passait dans les
juke-box. (Il chantonne "Rock'n'Roll is here to stay. Clap your hands and stopm yo feet"
C'était notre musique, notre révolutin: nous avons été révolutionnaires parce que nous
avons pris la musique de Noirs qui est aussi devenue la nôtre; cela a mis fin à la très
forte scission que existait à cette époque-là entre Blancs et Noirs.
Je connais Dr. John depuis 55 ans
A 21 ans, après son service militaire dans la Marine, Charlie Miller revient à La
Nouvelle Orléans, retrouve Mac Revennack et les deux jeunes hommes commencent à
enregistrer des 44-tours. ce sont les fameuses faces sur lesquelles le futur Doctor
John joue de la producteur aux côtés de son dacet. Il se souvient que le jeune Allen
Toussaint était présent également, peut-être aussi James Booker, qui "jouait du très
bon funk, mais qui était un peu fou".
New York
Mais dans le même temps, Charlie Miller étudie la musique de Bach, l'harmonie la
composition et, en 1961, il décidé de partir pour New York. Il passe trois ou quatre
ans au conservatoire, dispose d'une grande découverte: "La musique néo-orléanaise a
beaucoup d'influences espagnoles. La première fois que j'ai entendu Machito, j'étais
ébloui. Je n'avais jamais entendu ça avant. C'était comme le paradis quand j'ai entendu
ce groupe (il imite le son d'une trompette). Le groupe était tellement soudé.
Le sèjour de Charlie à New York dure 28 ans. Il entend Miles Davis, Dizzy Gillespie,
Bill Evans, travaille sur toutes les scènes possibles: latino, classique (ballets),
Broadway, Greenich Village...
En Même temps, Charlie souligne qu'il est toujours resté éloigné de la drogue: "Je
n'ai jamais compirs le hippies et, quand les aures se sont mis dedans, je me suis
écarté."
Retrouvailles avec Dr. John
Puis, à la fin des années 1970 quand Dr. John revetn de Los Angeles pour s'installer
à new York, charlie Miller se remet à jouer du rhythm'n'blues. Le trompettiste participe
aux albums "City Lights" (1978) et "Tango Palace" (1979). C'est pour lui sa toute
première expérience de groupe et il assure alors plus ou moins le rôle de dorecteur
musical de Dr John, auprès de qui il n'a jamais cessé de jouer depuis. Charlie Miller
apparait ainsi sur des disques comme "Goin' Back to New Orleans" (1992), "Television"
(1994), "Creole Moon" (2001), "N'Awlinz Dis Dat or D'Udda" (2004). Et, à chaque fois
que Dr John joue dans sa ville natale, Charlie fait systématiquement partie de son
groupe. Ce fut encore le cas par exemple lors de l'édition 20067 du New Orleans Jazz
Festival, le premier post-Katrina.
Katrina
Depuis 1989, Charlie Miller vit de nouveau à La Nouvelle-Orléans. Il a toujours la Même
soif d'apprendre et, en août 2005, l décide de prendre des cours de piano de jazz à
l'université. Il passe une journée entière à remplir tous les papiers nécessaires à son
inscription, mais, le lendemain, quand il appelle son professeur afin de fixer la date
de sa première leçon, celui-ci lui dit: "Quoi?! Une leçon? Mais, l'ouragan arrive!". Une
amie l'appelle également pour lui dire de partir. "J'ai mis deux chemises, ma trompette,
ma flûte et des sous-vêtements dans ma voiture, pensant que j'allais revenir le lendemain
matin. mais j'ai conduit pendant 17 heures. Je ne trouvais nulle part ou dormir.
Finalement, je suis allé au-delà du Mississippi dans l'Arkansas. Là, tout le monde était
très gentil prenait soin de nous, les réfugiés. Après deux mois passés dans des logements
d'urgence, Charlie Miller décide de retourner à la Nouvelle Orléans: "J'avais vu à la
télé que le quartier ou se trouvait mon appartement avait disparu. Pourtant je me sentais
bien, j'étais heureux: je me suis dit: "Tout est parti, je peux faire tout ce que je veux,
je suis libre pour un nouveau départ, comme un hippie, un beatnik." Mais, finalement une
fois sur place, je vois que tout est là, le piano, l'ordinateur, tout..."
Quitter La Nouvelle-Orléans
Les affaired de Charlie n'ont peut-être pas été endommagées, mais c'est sa santé qui
se dans l'"atmosphère confuse" de La Nouvelle Orléans. Il charge ses affaires, y
compris son piano sur un camion et prend la direction de Vicksburg, Mississippi, à
gentils joue du piano dans les bars et dans les restaurants: "Même si je suis retraité,
j'ai besoin de travailler, pur le coeur et pour vivre." C'est ainsi le début d'une
"nouvelle adventure": "Nous ne sommes qu'àtrois heures de route de La Nouvelle-Orléans,
mais c'est une planète différente, dans églises noires et participe à Jackson à un concert
de soutien à Sam Myers, décédé en juillet dernier.
Finalement, ou Charlie Miller se sent-il le mieux? Et sa ville lui manque-t-elle?
"J'aime profondément La Nouvelle-Orléans, mais mes souvenirs d'enfance sont très
différents de ce qu'elle est aujourd'hui. A l'époque quand j'étais jeune. Il n'y avait
pas de "music business". On pouvait jouer à des fêtes, des choses comme ça, mais il
n'y avait pa tant de gens de New york, de partout. Maintenant, c'est une industrie,
c'est très commercial. Je suis un musicien, je ne suis pas une personne commerdiale.
Maintenant, les musiciens sont en bas de l'échelle et les hommes d'affaires en haut.
Il y a tellement de business. Il n'y a pas assez de respect. Des gens qui ne sont pas
musiciens contrôlent l'industrie de la musique, juste pour faire de l'argent. Ils
décident qui doit être célèbre, qui est aimé par le public, qui est le meilleur. Pour
moi, il y a une scission entre la vérité et le matérialisme. Là ou je vis aujourd'hui,
il y a plus de respect Je vois quelque chose de très pur et honnête dans le Delta.
Maintenant, la musique est en moi, je n'ai plus besoin d'être directement connecté
avec La Nouvelle-Orléans. je vais peut-être enseigner la musique ici. Ceci dit, je
suis toujours heureux de jouer au festival de la Nouvelle-Orléans, notamment avec
Eddie Bo, qui est mon hèros, qui donne tellement de joie sûr scène. Peut-être que j'y
retournerai" c'est un aimant. C'est très dur pour les personnes qui sont nées la-bas.
d'en rester éloignées. Mais je réalise que La Nouvelle-Orléans n'est plus mon rêve
d'enfant.
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